La médiation dans les cas de harcèlement psychologique

08-09-2020
Une plainte de harcèlement psychologique, que celle-ci provienne d’un employé ou d’un gestionnaire, révèle bien souvent un problème plus grand qu’un simple conflit de travail […]
Rédigé par :
Élaine Léger & Samuel Labrecque, FASKEN
Gens d'affaires assis à la table de conférence

Une plainte de harcèlement psychologique, que celle-ci provienne d’un employé ou d’un gestionnaire, révèle bien souvent un problème plus grand qu’un simple conflit de travail. Dans bien des cas, cette plainte témoigne de carences sur le plan de la gestion ou d’une dégradation prolongée des relations de travail. Un tel conflit peut souvent se régler autrement que devant un juge administratif. Prenons par exemple le cas d’un salarié qui dépose une plainte à l’égard de son gestionnaire, mais dont la situation ne permet pas d’être qualifiée comme étant du « harcèlement psychologique » au sens de la législation québécoise et plus précisément en vertu de la Loi sur les normes du travail. Cette situation, bien qu’insuffisante pour entrainer une conséquence légale à l’employeur, témoigne de relations de travail difficiles qui risquent de s’envenimer si aucune mesure n’est prise. C’est pourquoi  il est souvent favorable, autant pour le salarié que pour l’employeur, de régler la situation en amont à l’aide de modes alternatifs de résolution des conflits, notamment la médiation. 

Qu’est-ce que la médiation?

Selon l’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec, la médiation se définit de la façon suivante : 

« La médiation est un processus volontaire et flexible, qui se déroule dans un cadre privé et confidentiel. Une personne neutre et impartiale, le médiateur, aide des personnes impliquées dans un conflit à communiquer, à tenter de résoudre leurs difficultés et à trouver par elles-mêmes une issue favorable à leur mésentente. »1 

En vertu de la législation québécoise, un salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique sous toute forme. Il est non seulement de la responsabilité de l’employeur de prendre les moyens raisonnables pour prévenir ce harcèlement, mais également de faire cesser cette situation lorsque celle-ci est portée à sa connaissance2. Afin de répondre à son obligation, il est parfois justifié d’avoir recours à la médiation.  À noter que même si votre politique ne prévoit pas la possibilité d’adhérer à la médiation, la Loi sur les normes du travail prévoit que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail peut nommer un tiers à titre de médiateur pour entendre les parties3. Dans tous les cas, cette méthode de résolution des conflits se doit d’être volontaire et les parties doivent s’investir réellement dans le processus, sinon elle sera, de toute évidence, vouée à l’échec. À noter également que pour la durée des séances, conformément à l’article 123.11 de la Loi sur les normes du travail, le salarié sera réputé être au travail.

Avantages de la médiation4 

  • Ce processus a lieu devant un tiers impartial. Le médiateur a pour rôle de trouver une solution qui bénéficiera aux deux parties et non de déterminer qui a raison, qui a tort et d’imposer une sanction en conséquence. Aussi, ce tiers se doit d’être impartial et peut être externe à l’entreprise. 
  • Il s’agit d’un processus flexible, peu coûteux et rapide. S’agissant d’un mode de règlement hors cour, ce processus n’est pas soumis aux contraintes procédurales des tribunaux et peut donc s’adapter aux besoins des parties. 
  • Il s’agit d’un processus confidentiel. Il n’y a pas de décision publiée suite au processus, ce qui peut être un avantage considérable pour les deux parties. Les dossiers de harcèlement psychologique sont souvent sensibles autant pour l’employeur que le plaignant.
  • Ce processus permet des solutions innovatrices. Les parties à un processus de médiation ne sont limitées que par leur imagination et ne sont pas limitées aux réparations pécuniaires prévues à l’article 123.15 de la Loi sur les normes du travail. Celles-ci peuvent sortir du carcan habituel et prévoir des solutions créatives, par exemple prévoir un nouveau processus de formation des gestionnaires ou changer les équipes de travail. 
Contenu supplémentaire

BONNES PRATIQUES À ADOPTER POUR AVOIR UNE MÉDIATION FRUCTUEUSE5

  • L’implication volontaire des parties dans le processus. La clé du succès de la médiation est la participation volontaire et véritable des parties au processus. À l’inverse, la médiation peut être contre-productive si elle est faite avec une partie qui n’est pas réceptive au dialogue, qui ne contribue pas aux échanges ou qui est absente des séances. 
  • La tenue d’une rencontre de prémédiation. Souvent, le salarié qui participe à un processus de médiation en sera à sa première expérience. Il est donc recommandé de prévoir une rencontre de prémédiation avec le médiateur. Ce dernier pourra donc aider les parties à définir leurs besoins et à rationaliser leurs attentes. 
  • Le soutien durant le processus. Comme le médiateur se doit d’être neutre et impartial, il ne peut pas conseiller le salarié sur la qualité des offres patronales et vice-versa. Il est donc recommandé que les parties soient accompagnées par quelqu’un de confiance pour faciliter la prise de décisions. 
  • Prévoir dans vos politiques en matière de harcèlement psychologique ce mode de résolution des conflits.

1. Institut de médiation et d’arbitrage du Québec, « Médiation », en ligne : <http://imaq.org/mediation/>
2. Art. 81.19,  Loi sur les normes du travail, ch. N-1.1. 
3. Art. 123.10,  Loi sur les normes du travail, ch. N-1.1.
4. Annes Des Roches, « Harcèlement psychologique, la médiation a bien meilleur goût… », Publications de l’Ordre des CRHA, en ligne : <https://ordrecrha.org/ressources/relations-travail/2008/10/harcelement-psychologique-la-mediation-a-bien-meilleur-gout>.
5. Frédéric Moisan, « Médiation pour harcèlement psychologique : quels sont les facteurs de satisfaction des plaignants? », Publications de l’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec, en ligne <http://imaq.org/2014/05/05/mediation-pour-harcelement-psychologique-quels-sont-les-facteurs-de-satisfaction-des-plaignants/>.